Un si petit chef d'Etat...
Contrairement à ce que je croyais, il n'y a pas que des blogs culinaires sur le net. C'est ainsi que j'ai découvert, un peu tard, ce texte qui commence à dater :
” Que peut-il ? Tout. Qu’a-t-il fait ? Rien.
Avec cette pleine puissance, en huit mois un homme de génie eût changé la face de la France, de l’Europe peut-être.
Seulement voilà, il a pris la France et n’en sait rien faire. Dieu sait pourtant que le Président se démène : il fait rage, il touche à tout, il court après les projets ; ne pouvant créer, il décrète ; il cherche à donner le change sur sa nullité ; c’est le mouvement perpétuel ; mais, hélas ! cette roue tourne à vide.
L’homme qui, après sa prise du pouvoir a épousé une princesse étrangère est un carriériste avantageux.
Il aime la gloriole, les paillettes, les grands mots, ce qui sonne, ce qui brille, toutes les verroteries du pouvoir.
Il a pour lui l’argent, l’agio, la banque, la Bourse, le coffre-fort. Il a des caprices, il faut qu’il les satisfasse.
Quand on mesure l’homme et qu’on le trouve si petit et qu’ensuite on mesure le succès et qu’on le trouve énorme, il est impossible que l’esprit n’éprouve pas quelque surprise.
On y ajoutera le cynisme car, la France, il la foule aux pieds, lui rit au nez, la brave, la nie, l’insulte et la bafoue ! Triste spectacle que celui du galop, à travers l’absurde, d’un homme médiocre échappé “.
Ces lignes sont extraites du pamphet "Napoléon le petit" écrit par Victor Hugo après le coup d'Etat de Louis-Napoléon Bonaparte (à ne pas confondre avec l'autre Napoléon, le premier du nom) et réédité chez Acte Sud.
En fait, je regrette un peu d'avoir abandonné tous ces grands auteurs juste croisés pendant ma scolarité. L'acuité de leur regard, leurs phrases ciselées sont une nourriture qui me manque et je ne m'en rendais pas compte. Oui, je devrais suivre l'exemple de ces téméraires qui s'y replongent avec délice... Cette littérature a encore tant à nous apporter.
D'ailleurs, de temps à autre, le blog Quadra et compagnie où j'ai trouvé ce texte illustre de bien belle manière ce mot de Beaumarchais : "Je me presse de rire de tout, de peur d'être obligé d'en pleurer."