Le Tableau Miam # 5
La première chose qui a attiré mon oeil sur ce tableau, c'est cette affreuse pendule. Surtout l'angelot à l'air quelque peu dégénéré, jurant totalement avec le reste de la composition, je trouve.
Nature morte au garde-manger à la pendule
Anonyme
Sinon, la marqueterie du soit-disant "garde-manger" (quelle nourriture pourrait-on garder dans une telle boîte ???) et le plateau de marbre de la table ont un beau rendu. Ensuite, les fruits sont peints avec un grand art, on distingue même la pruine sur la peau des raisins. De beaux fruits aussi appétissants que des vrais, c'est tout de même le principal pour une nature morte.
En fait, si je voulais vous présenter ce tableau dans la rubrique du Tableau Miam du Mercredi, c'est pour son étiquette qui sort de l'ordinaire :
Evidemment, je connaissais l'existence des oeuvres d'art spoliées par les Nazis et qui n'ont pu retrouver après la guerre leurs propriétaires ou, tout au moins, des ayant-droits. J'ignorais toutefois que certaines de ces oeuvres se retrouvaient ainsi dans les musées nationaux, sous ce sigle de MNR - Musées Nationaux Récupération.
Dans le site ci-dessus en lien, on peut lire la fiche de cette Nature morte au garde-manger à la pendule. Où on s'aperçoit qu'au musée des Beaux-Arts de Lille, l'orthographe est parfois aléatoire : la galerie parisienne où ce tableau a été acheté durant la guerre est Schmit & Cie et non Schmidt, le musée allemand où il atterrit alors est le Kaiser Wilhelm Museum de Krefeld et le mot musée du sigle MNR est au pluriel puisqu'ils sont nationaux. Enfin, ce ne sont que des détails, ben sûr.
L'important, ce sont les histoires vécues par les individus qui gravitèrent autour de ce tableau. Déjà, le nom du peintre fut perdu par le temps. Ensuite, comment cette toile s'est-elle retrouvée dans la galerie Schmit & Cie, vendue peut-être trois clopinettes par une famille aux abois ? Quel fut le destin sans doute funeste du dernier propriétaire de cette nature morte ? Peut-être que ce tableau est la seule trace restant sur terre de cet homme...
En découvrant cette oeuvre, j'ergotais bêtement sur l'allure peu esthétique d'une pendule. Maintenant, j'y vois uniquement le témoignage muet de la marche impitoyable de l'Histoire.
Ciorane